Sunday, February 25, 2007

"Composition", "explanation", poème

Presque ça me fait rire de penser à une certaine étendue d'ignorance dans laquelle j'ai pu lire l'essai (la conférence) Composition and Explanation de Stein - essai publié par la Horgath Press des Woolf, et où j'investis, recueille, beaucoup de ma compréhension de la poétique moderniste. Le bonheur du travail de récupération historique, une histoire des discours, dans ces dépliages et complexifications ; critical articulacy.
C'est dans Connors, son histoire de Composition-Rhetoric, toujours. Comment dans les années 1870-1890-1910 (Stein se forme à Harvard dans les années 90s - dans l'environnement de William James, et à sa psychologie), l'enseignement supérieur de la Composition, Freshman Composition, avec ses pratiques codées et ses textbooks institués et institutants, s'articule en une taxonomie rhétorique, progressivement plus instrumentale et formelle, où en particulier peut s'obverser un passage de l'étude descriptive et théorique des "modes" rhétoriques (la distinction principale entre Argument et Exposition, qui détermine ensuite la séparation et les histoires disciplinaires et culturelles divergentes de la rhetoric et de la composition, l'une prenant racine dans le champ de English, l'autre devant migrer vers Speech), à l'étude pratique de la seule Exposition, avec ses "methods".
  • les Modes : Description, Narration (qui migre vers fiction writing teaching - Connors ne dit pas si c'est la même histoire qui débouche sur les MFA et BFA [à BC par ex.] de creative writing), Exposition, Persuation/Argument. Mis en place par Alexander Bain, 1866, comme modernisation par rapport à l'approche belletristic de Blair (où ingrédient majeur le style, lié à la critique littéraire).
  • les Méthodes : diversement désignées - [et comme approche, inspirées du courant Deweyite, pour l'enseignement supérieur de "English for Life Skills" - dans le programme de la convention du CCCC, on retrouve très présent ce discours de la Composition comme pragmatique considérant avec une attention qui lui est propre et caractéristique "the lives of our students"] : Repetition, Contrast, Explanation, Definition, Illustration, Detail, Proof - aussi : Unity, Coherence, Emphasis.

Alors les "Composition" et "Explanation" de l'essai de Stein prennent une complexion autrement épaisse ; et devient visible un travail culturel à la fois plus concrètement évident et manifestement plus incisivement critique. Avec les ambiguïtés de tout corps à corps avec des actualités discursives - comme celles de Joyce dans les rhétoriques nationales et nationalistes irlandaises dans Ulysses. La valeur d'une réénonciation : d'une invention, d'une heuristique, discursives. Avec ses racines et ses traînes et ses sillages, dans tous sens, culturels.

Par où commencer à entendre ces effets ? C'est toujours sur le "as" que se fait la bascule critique. Mais aussi alors : la valeur culturelle de "Composition", et celle d'appeler sa pratique poétique "Composition" (alors qu'on est passé dans la discipline d'un rapport à la littérature comme belles-lettres à une théorie du discours, qui marginalise littérature et style et critique littéraire, et marginalise aussi la tradition rhétorique pour privilégier l' "Exposition = Explanation" - comme se pose la question de l'art alors ?) ; celle de prendre aussi le concept de "Explanation" (qu'est-ce qu'elle fait, à faire ça ?) ; et celle enfin poétiquement de les faire s'équivaloir. Pour l'instant je ne peux que ouvrir ces questions - perplexité, tiens. Mais c'est par là qu'il faut aller.

A entendre aussi très distinctement : le frayage du terme "discourse" dans cette histoire. Comment il viendra s'articuler, alors, se jeter dans, le cours de "discourse analysis", sans doute. A entendre aussi en comparatisme : AB diffusait récemment un appel à communications pour le colloque de l'Université de Franche-Comté sur le rapport entre Linguistique et Littérature, où était pointé le couple texte/discours, et le fil de l'analyse du discours, comme une ligne du travail où les deux disciplines ont une histoire de rencontres, difficiles. 40 ans depuis Cluny, si je me rappelle bien.

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Saturday, February 24, 2007

Notes d'ambiance discursive : composition, culture, politique

Je note, de la lecture du programme de la Convention de la CCCC, qu'on parle de :
  • globalism
  • situation des étudiants : "how many students feel they must use their years in college to acquire a set of marketable skills in order to find jobs as information workers in a knowledge economy"; such "instrumentalism" (+ "issue of the global market for textbooks")
  • democracy studies - et "literacy and democracy". With the need to update and revitalize work by Mina Shaughnessy in the 1970s' period of open admissions at CUNY (associated with the concept of "basic writing").
  • WAC : Writing Across the Curriculum
  • WID : Writing in the Disciplines

Je note aussi : Prof. J. Philippe-Joseph Salazar, Distinguished Chair in Rhetoric and Humane Letters, U of Cape Town (South Af), as keynote speaker. Elève de Lévinas, Barthes et Althusser à Ulm, directeur de recherche en "Rhetoric and Democracy" au Collège International de Philosophie, ayant travaillé far and wide sur l'histoire, la théorie et la politique de la rhétorique, dont sur le Report on Truth and Reconciliation in South Africa. Actuellement professeur invité en democracy studies à Orebro, Suède. Programme pour la rhétorique comme lieu d'où exploser les falsifications de la "public virtue" (and public roguery - but these are my own words. In his : "the collapse of rhetorical efficacy" - alors là on prend en effet un "tournant éthique". Rhétorique et éthique lévinassienne : un même plan conceptuel, un noeud d'une théorie du langage à une théorie de l'altérité. Voilà une branche identifiée, peut-être). Situation intéressante.

Aussi : le thème de la Convention de 2007 : Representing Identities. Parmi les thèmes de travail : digital literacy, equity. An interesting take on the misprisions with Chinese rhetorics (singular discursive traditions of quotation and paraphrase); the staking of a field labelled Composition and Cultural Rhetoric program.

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Friday, February 23, 2007

Composition : thick description

Avec Robert J. Connors toujours, Composition-Rhetoric.
Une histoire disciplinaire doit trouver sa meat dans une histoire sociologique aussi, de manière très épaisse (Geertz). Comment la discipline, ou disons la formation discursive, l’institution discursive, de la Composition, s’est transformée avant tout à cause de la pression sociale : d’avoir été la discipline des gentlemen, pour pulpit and bar, devenue la discipline de la base, pour toute formation vocational ; mais surtout la discipline (dé-discipline) enseignée et pensée par le prolétariat de l’enseignement supérieur, adjuncts maintenant et tous autres statuts ancillaires de la fin 19ème au milieu du 20ème.
La Composition comme carrefour d'une histoire culturelle sociale et politique. Qui rendra impossible les points de vue exclusivement scientifiques - on le savait, mais on pouvait l'oublier - d'une histoire intellectuelle. La Composition, au crux d'une histoire de l'université comme institution du savoir ; et, donc, point névralgique.

A voir, pour une documentation très thick d'un coup : le site de la CCCC (Conference on College Composition and Communication), qui tient sa grande convention à New York dans les jours qui viennent. Le site ; le programme de la conférence (61 p., avec argumentaire et détail des activités, nombreuses) ; le blog très récemment ouvert.

Je note d'avance la nouvelle configuration du merge avec la Communication. Voir dans quels termes.
Autre point de curiosité : ce que c'est qu'un Speech department ici. ça a l'air d'exister depuis longtemps (19ème ?). Commons semble en parler comme le lieu où à dû se réfugier la rhétorique orale après la nouvelle concentration sur l'écrit de la rhétorique devenue Composition.
Pour Composition, en général - et c'est bien là qu'est la ligne de front - elle est incluse dans le English department. Certaines universités ont des writing programs. Certainement à CUNY, à BC, on a des organisations transversales, programmes de WAC (Writing Across the Curriculum), qui met en série et donne visibilité à des cours "writing intensive". Voir.

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Wednesday, February 14, 2007

Composition studies : literature et literacy

Un peu au pif, trusting the serendipity of open-shelf libraries, j'ai sorti deux volumes un peu récents et un peu ambitieux du côté de l'histoire (contextualisation) et de la théorisation pour continuer à travailler le rapport entre littérature et langage dans une de ses questions qui forme aux Etats-Unis une pratique étonnamment fondamentale et déterminante dans l'institution universitaire - et au-delà (creative writing), et en amont (high school). C'est la tension historique et politique entre English et Composition. Literature et literacy.
Mes deux titres, en dehors de l'histoire de Graff et de la Rhétorique d'Adam Smith (quoique je n'aie pas encore jeté un oeil dans Hugh Blair, qui semble fonctionner comme une référence plus centrale encore, de cette tradition de la rhétorique associée au belletrism : Lectures on Rhetoric and Belles Lettres, To Which Are Added, Copious Questions: And an Analysis of Each Lecture By Abraham Mills, Teacher of Rhetoric and Belles-Lettres, 1783, Philadelphia, Porter and Coates, 1873) :

  • Connors, Robert J. Composition-Rhetoric. Backgrounds, Theory, and Pedagogy. U of Pittsburgh P, 1997
  • McClelland, Ben W. and Timothy R. Donovan eds. Perspectives on Research and Scholarship in Composition. New York, MLA, 1985
  • j'ajoute un article proposé à lecture et discussion dans le cadre du groupe de travail de Brooklyn College : "The Cultures of Literature and Composition: What Could Each Learn from the Other?", Peter Elbow dans College English (May 2002).
Autour de ce jalon institutionnel se polarise tout un ensemble de problèmes, qui se placent par là dans une perspective commune dont on peut tirer pas mal de lucidité sur une situation contemporaine. Si nombreux et enchevêtrés qu'on n'aura pas fini de les distinguer, de les identifier. Il faut commencer.

  • histoire de l'université : un moment déterminant est la décision prise par Harvard, en 1874, d'établir un "written entrance exam", les autres établissements devant naturellement follow suit dans les dix années suivantes. La réalisation de "the illiteracy of American boys", et l'installation progressive et universelle de "Freshman Composition". Appelé, dans sa première morphe à Harvard, "English A". Une remarquable et étrange redisposition des Humanités, et de la littérature dans son fonctionnement et sa valeur dans le trivium des Liberal Arts comme acculturation.
  • histoire disciplinaire : un autre moment déterminant : quelque part dans la fin des années 60, et l'apparition des Composition studies, comme champ scientifique
  • histoire disciplinaire toujours : l'histoire d'une progressive érosion de la littérature dans English - Freshman Composition pouvant fonctionner dans les établissements comme une façon de conserver du terrain, et la fonction leavisite de la littérature comme Humanité et "centre" de l'université comme culture, pour les départements de English mis en péril par les secousses disciplinaires des 70s-80s. Composition comme outil de présence, déjà dans un déporté scientifique et donc culturel (colonie et arc-boutant).
  • une histoire sociale et politique : de la "proletarianization of the profession of English". De la fracture entre adjuncts-TAs (les graduate students formant le gros des troupes pour Composition) et professors (honorifiquement chargés de l'enseignement de littérature), a découlé nécessairement l'érosion générale d'une situation politique des enseignants - de English. [plus complexe que ça, bien sûr. Je ne fais que poser un premier chaînon. M'importe : comprendre qu'une certaine division du travail engendre nécessairement, ou disons classiquement dans les rythmes politiques modernes, une fragilisation sociale culturelle et politique du secteur dans son ensemble. Peut-être. L'opération politique de la division, puis la fragmentation, et l'individualisation. Beaucoup plus à déplier ici. M'importe : le fait que cette articulation se fait, sur ce terrain particulier, autour d'un partage entre literature et literacy. Qui est superposable assez précisément je pense, il faudrait voir, avec le partage entre recherche et enseignement.]

Mais ce que je veux noter surtout c'est le visage, la structure que ça a pris, et que ça a institutionnalisé (départements, curricula, industrie des textbooks, emploi universitaire des graduate students), jusqu'à devenir une grammaire curieusement formalisée. Ses termes sont parlants, et se donnent bien à l'analyse. On sent qu'une analyse est possible. Je la commence.

Dans les termes de Robert J. Connors donc (p. 12) :

[The textbooks] had in common an attraction for taxonomy and simplicity. They included the four modes of discourse (narration, description, exposition, and argument [on parle donc, je l'ai rencontré à BC, de "expository prose", de "argumentative prose"]), the methods of exposition (process analysis, definition, comparison/contrast, classification, and so on), the three levels of discourse (diction, sentence, and paragraph), the "narrow-select-develop-outline" invention structure, the conception of the organic paragraph, the rhetorical and grammatical sentence types, and the static abstractions of Unity, Coherence, and Emphasis. [... :] the very heart-ideas of the composition course after 1910

Des réactions classiques de "theory years" : "poststructuralist" ("the benighted rationalist attitudes, oppressive patriarchal values"), "Marxo-constructivist" ("in the service of hierarchy, elitism, and a vision of capitalist individualism"), "feminist analysis of composition history"...

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Sunday, February 11, 2007

La théorie littéraire hors du champ littéraire

Oui, aussi : "avoir de la littérature", et quelque chose de bien compris en séminaire de théorie à Brooklyn College : que la "théorie" française a peu marqué les pratiques insitutionnelles des départements de English ici ; que ce n'est pas primordialement en Littérature qu'on l'a reçue et retravaillée ; que c'est bien pour ça qu'elle ne circule pas sous la formule de "literary theory" mais de "theory/Theory" tout court ; que son effet spectaculaire a été plutôt dans les nouveaux champs frayés puis inscrits dans le tissu institutionnel -- Queer Studies dans le sillage de Foucault, et les carrefours des Women & Gender Studies, Postcolonial Studies etc. dans le sillage de Derrida ; et, j'avais moins regardé de ce côté mais il faut le voir bien, en particulier parce que ça situe et fait résonner aussi le travail anglais des Cultural Studies : Film Studies, Media Studies.
En littérature, la Comparative Literature comme plaque tournante effectivement (et des lieux comme Yale French Studies).
Le plus intact semble être le niveau undergraduate des English departments donc. Puis, naturellement, le hiatus qui fait que les étudiants de MA, du même département, ont eux ces repères discursifs. Mais acquis où? et quelle formation ? - ma vraie question. Un étudiant du séminaire actuel parle d'avoir beaucoup lu (lu - avoir de la littérature en théorie, donc), mais d'en avoir gardé peu et confus ; plusieurs autres parlent de problèmes d'intimidation.
Puis il y a cet ingrédient très actif, je le sens de toutes parts et régulièrement dans mes traversées et commerce : le cosmopolitisme de la référence française. Il y a quelque chose de politique, évident, repérable même, dans l'interculturel là. J'ai toujours hâte de voir ce qu'en dit Cusset. La valeur de la référence française pour le public universitaire et intellectuel américain. Toute une épaisseur d'histoire ; toute une complexité d'enjeux. A voir.

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Communication

Comme annoncé dans ma "chronique" lors de la dernière journée Polart, je continue mon début de chemin vers les SIC (Sciences de l'Information et de la Communication, selon l'insider Daniel Bougnoux, dans Introduction aux sciences de la communication, La Découverte, coll° Repères, 2ème édition, 2001. A Paris 8 on dit aussi Infocom - quel usage, de ce terme, dehors?).
Dans le Bougnoux, je lis, au détour d'une introduction : "Mais si la communication est coextensive à nos formes de vie, si vivre c'est communiquer [souligné par l'auteur], comme l'ont très justement posé en principe Bateson et ses disciples, il faut distinguer entre les registres et tracer des frontières sémiotiques, pragmatiques, médiatiques [...]" (p. 11).
Molière : il faut manger pour vivre, et non vivre pour manger.
Benveniste : avant de servir à communiquer, le langage sert à vivre.

C'est pourquoi je note aussi, annoncée sur la liste de la Société des Anglicistes, cette annonce, qui pose bien certains termes et dessine certains contextes :

Prochaine conference scientifique de Telecom Paris
Pourquoi l'etre
humain communique-t-il ?

par Jean-Louis Dessalles, enseignant-chercheur
14 fevrier 2007 - 18h30 - amphi Emeraude / Telecom Paris

Les etres humains ont un comportement unique dans la nature. Ils donnent spontanément des informations a qui veut bien les ecouter. Pourtant, dans le monde darwinien dans lequel notre espece est nee, les etres se preoccupent avant tout de leur propre survie. Sachant que la reproduction est un jeu a somme constante, pourquoi descendons-nous d'individus qui ont donne des informations a leurs concurrents ? Les simulations informatiques permettent detester les hypotheses. Elles suggerent que le langage n'est pas une forme de cooperation, mais une forme de competition "publicitaire" par laquelle les individus affichent certaines qualites cognitives et sociales. Cette perspective biologique nous permet de jeter un regard nouveau sur l'emergence non anticipee du Web ou le phénomene des blogs.
Quand la science pense le social (par le pourquoi, d'ailleurs). Et l'ingénierie, le culturel.
La société contemporaine pensée par le discours des télécommunications. Reste, pour moi en tout cas, à mieux mesurer l'importance de ce discours parmi ceux qui déterminent le présent idéologique. Quel poids et quel réseau d'influence, par exemple, par rapport à l'économisme, ou au management.

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Wednesday, February 07, 2007

Le travail universitaire

Ce qui me paraît si juste dans pointer cette question pour l'actualité la plus immédiate, c'est qu'elle me semble un crux particulièrement clair du continu entre l'université et la société. Celui dont l'évidence semble toujours à redémontrer - quelle pression culturelle et idéologique de ces décennies, pour qu'il faille cette sensation d'avoir à refaire la démonstration constamment; à trouver toujours d'autres moyens pour faire voir ? - du fait que l'université est l'une des interfaces sociales et culturelles, et l'un des fronts conflictuels de la vie politique, et non la ivory tower (Graff doit encore s'en défendre - et en le faisant, par malaise de culpabilité, il affaiblit sa position de discours), et non l'isolement glorieux/prétentieux (depending which side you're on), et non les vieilleries et inanités se reproduisant.
C'est juste, avec toutes les torsions que bien sûr on y repère d'emblée, que le Grand Débat ouvert pour verrouiller le mouvement social sur le CPE oriente les regards sur la question de l'emploi. Exactement, sur la question du travail, détourner le regard dans la direction qui n'est pas celle du travail comme socialisation et politisation, ni celle de la valeur comme unité de vie. Et où on tient un peu plus séparés les plans du travail et de l'intellectuel. Où on rend un peu plus intenable le travail intellectuel comme travail.
Parler d'emploi comme le produit universitaire - et ne pas parler de l'emploi universitaire. Parler des compétences pour l'emploi comme mission de l'université - et taire les processus jumeaux de la formation (travail), et de la recherche (travail).
L'université est, de toutes parts, dans le monde du travail. Qu'il faut déconfondre d'avec le monde de l'entreprise - ne pas le laisser kidnapper pour la société de l'entreprise.
Le travail intellectuel, donc. Sa pratique, sereinement sur son propre terrain. Et le travail universitaire, comme point de vue à exiger dans la lutte-la vie (simplement la pratique des enjeux) politique.

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Avoir de la littérature

Voilà, un caractère que je reconnais maintenant de la pratique universitaire de la littérature (English) aux Etats-Unis : la littérature se lit, beaucoup, longuement et largement, en volume - plus que dans les universités françaises que je connais. Les étudiants s'attendent à avoir de longues lectures à faire pour chaque cours. On ne s'étonne pas d'avoir à passer, pour un cours d'un semestre, dans la Divine Comédie, Don Quichotte, Anna Karénine, un bon Dickens, Madame Bovary. En passant deux ou trois semaines sur chacun. Les bons étudiants et les collègues ont de la littérature (tiens, je viens de lire René Wellek sur l'histoire de "literature" depuis Rome), une culture.
Le premier discours qu'on tient sur la littérature : enjoy, read, experience - connect with. Response papers. On parle de son expérience de lecture, how does it make you feel? Alors les masques et écrans ordinaires : le personnage, les sentiments de l'auteur. [nb : sujet type pour les devoirs de Français de la génération de mes parents : "Description et analyse des sentiments"]. On a beaucoup de mal à attirer l'attention vers la langue et le comment ; vers le précis et la lettre. Pour arriver au signifiant il faut une marche forcée, patiente.
ça m'intéresse. J'ai envie de me le laisser entendre, et trouver comment faire avec dans l'interaction en cours. Question d'éthique. Et oui des savoirs éthiques qui se forment dans la lecture de la Great Tradition de Leavis - George Eliot. C'est délicat, il faut y aller avec une attention, c'est une question fine de l'historicité. Etre celui qui experiences, ou devenir celui, devant, de l'experiencing.
Avoir des lettres. La littérature comme culture : un savoir moral et social, culturel et personnel. Bildung, ensuite. Woolf et l'éducation at home par la littérature anglaise (et sous l'égide du père historien et biographe de la littérature, Leslie Stephen Mr. Victorian-Letters). Les lettres comme capital culturel, aussi, naturellement : comme bagage du gentleman. Rafinement des moeurs, et artistocratisme.
M'intéresse, d'approcher ces zones des savoirs humanistes et libéraux. Tradition, culture, et leur fonctionnement par infusion, anti-technique, anti-objectivations. Des choses fines à y savoir, de la nature d' histoire. Dans Tocqueville sur la vie des peuples, la vie comme culture.
Tradition, culture, littérature : concepts d'une droite douce, conservatrice, et qui sait ce qu'elle conserve. Une théorie des sociétés. A récupérer comme source et lac, pour une finesse critique.

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