Thursday, August 23, 2007

La littérature, pour : les valeurs - le retour aux

So much! to write about Compagnon. On n'en finit avec ce noeud si parlant, qui parle et qui parle, d'une situation actuelle de la critique : un discours officiel sur la littérature et les études littéraires, sur les humanités (comme point de vue sur les sciences humaines - la question est juste ; la perspective idéologique la reboucle. C'est Antoine Compagnon élu à la Chaire de littérature française moderne et contemporaine : histoire, critique, théorie) ; un discours intellectuel dominant (c'est Le Débat, et les développements des positions Ferry et Renaut qui ramènent au sujet du kantisme, libéralisme contre les "philosophismes" de 68 - et fabriquent, en plein accord avec la direction politique sortie des élections présidentielles de mai, une politique des valeurs, moralisation républicaine) ; et tout simplement tout plainly donc un état politique.

Ceci à la lecture de la leçon inaugurale de Compagnon au Collège de France, tenue en novembre 2006 : La Littérature, pour quoi faire? (Collège de France / Fayard, 2007), et le texte d'AB, "De la critique au consensus : l'effet Compagnon", à paraître dans le dossier de SM sur la critique dans un prochain numéro du Français aujourd'hui, je crois.

Echeveau, fils divers nombreux mais bien tous convergents.
. Enjeu central, crux et hub : une conception de la critique (soit du savoir-pouvoir), son "effet" (AB) de bouclage politique par la moralisation (une politique des valeurs), et l'instrumentalisation de la littérature dans le processus. A la question "poétique et politique", une réponse en forme de : "lettres et morale du soi - dans un présent culturel déculturé".
. Enjeu central encore : l'institutionnalisation (AB), l'officialisation d'une orthodoxie politico-culturelle, une idéologie, dont il faut apprendre à décrypter soigneusement, patiemment, les actes qui continûment montent les murs, masquent les problèmes, rendent sourds à l'historicité qui pousse de tous les côtés, nécessairement, dans les fissures et en lignes de fuites intensives.
. Un échec (AB) en effet, pour une tâche critique qui se donne l'injonction d'un travail de "pertinence" (leçon, p. 32) au sein d'un présent qui demanderait des comptes. Et bute, exactement, sur le problème de la modernité. Exactement, ce que la position de Compagnon ne peut pas appréhender ; plus qu'un objet central de ses recherches, un "démon" qui ne serait plus un pantin.

Voilà : il y a une proposition critique ; elle est anticritique ; en cela elle met en lumière des recoins importants d'une situation contemporaine, et permet de pointer dans ces composés idéologiques du moment des enjeux utiles à analyser pour les ressources du politique. Générateurs.
Dans le désordre, et à finir de rédiger :
  1. "pour quoi faire?" - la rhétorique de provocation proposée en titre, en bannière (let's talk straight, cut the crap - toutes les potentialités du populisme y sont en germe. C'est en effet une question : il s'agit des comment de sa reprise critique), est une proposition de problématique ; le geste critique annoncé. Mais devient clair au cours du développement que la question n'est pas le produit d'une problématisation propre, pas l'effet d'une prise critique sur un présent analysé par un point de vue (- un sujet de la critique. Un auteur). L'injonction n'est que celle de la rumeur néolibérale ordinaire, qui nous fait depuis des années une ambiance d'utilitarisme où sont pris à parti et systématiquement attaqués tous les lieux du public - non pas, par exemple, la littérature (qui perdure très bien dans ses modes capitalistes), mais les études littéraires.
  2. le "doute" - et la conciliation, et la mauvaise conscience. Et la "défense", ultimately, comme mode critique - sa faiblesse, son négatif de pouvoir.
  3. la seconde main - et "la parole du on" (AB).
  4. environnement discursif et idéologique : Bloom (qui lui développe une théorie, pointue et réorganisatrice des enjeux, du "canon littéraire", soit une théorie de la valeur), Kundera, les Great Books (ici on est à un pas de Léo Strauss), Fumaroli
  5. la morale - la littérature pour une politique des valeurs. cf ici Eric Deschavanne sur l'enseignement philosophique scolaire (Le Débat, ami-août 2007) et la nécessité des contenus, contre l'historicité. Cf tout ce numéro du Débat, 145, consacré à l'école, la culture générale, et la jeunesse (ce composé-là) - et la contribution de Compagnon
  6. les lettres et les lettrés (15), la culture des cultivés, l'humaniste
  7. actualité : la diversité des littératures françaises : par la langue du Moyen-Age...
  8. à AB : une autre couche de paramètres est en jeu, la référence américaine, que Compagnon passe le plus souvent à l'implicite. Le "canon" est un problème national de l'Amérique, de même que la "théorie" - avec ses contextes spécifiques. C'est intéressant que Compagnon le passe le plus souvent sous silence. Dans le domaine anglophone, on a Bloom dans le paysage, mais aussi Terry Eagleton, et son texte, tout simple, qui ouvre Introduction to Literary Theory de 1983 : "What is Literature?" et auquel la question de la question (de "Qu'est-ce que" à "Que peut", "autrement dit 'pour quoi faire?' " - pp. 32-33. L' "autrement dit" est un sleight of hand tout à fait repérable, ici), dans la leçon, fait un écho étouffé. Le texte d'Eagleton est articulé autour, justement, d'une historicisation de la question, et débouche vers un positionnement théorique et critique réel (marxiste, historiciste, et incisif), qui coupe de nouvelles avenues dans l'histoire et les concepts entourant le littéraire ; bousculant les ontologies successives pour exiger la pleine vue du problème de l'idéologie, et de la nature collective des questions de la lecture. Ethique et politique effectives, qui font entendrent par contraste la faiblesse théorique de l'individualisme moral proposé par l' "éthique de la lecture" dans la leçon, en tant que le geste de dépolitisation qu'il constitue. C'est en positionnement par rapport à ces deux, Bloom et Eagleton, pour commencer, que la pratique "critique" de Compagnon fait sens. Et le rôle qu'il se donne et qu'on lui laisse prendre de voix d'autorité pour les Lettres - grande voix culturelle du cultural critic, figure intellectuelle qui a son histoire spécifique, ses histoires, aux Etats-Unis et en Angleterre. La dimension, parce qu' aussi elle est masquée, importe. Il faut aussi ajouter à ce paysage fantôme le ethical turn dont Compagnon ne dit rien tout en marchant dans ses traces. Et penser à Jean-Michel Rabaté, qui a lui aussi fait l'expérience de la déportation intellectuelle France-Amérique, mais produit, par exemple avec le livre manifeste de 2002, The Future of Theory, une autre qualité d'analyse. Ce qui veut dire qu'il y a aussi tout ce double-fond du discours de Compagnon : la formation discursive "Against Theory" fournie qui s'est constituée aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, depuis 1982 (texte de Knapp & Michaels).
  9. je n'ai pas fini - à suivre... Il y a, d'ailleurs, à positionner Fabula également dans cet ensemble.

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