Thursday, May 10, 2007

American cliché

Bill Bryson, of all ethnographic commentators, in I'm a Stranger Here Myself (1999) :
There is a great deal about America that is deeply appealing. There are all the obvious things that outsiders always remark on -- the ease and convenience of life, the friendliness of the people, the astoundingly abundant portions, the intoxicating sense of space, the cheerfulness of nearly everyone who serves you, the notion that almost any desire or whim can be simply and instantly gratified.

The mysteries of group representations, and of always-situated observation. The mysterious force of cliché - which is also the most deep-known, unmysterious and intimate social knowledge. But the fierce stakes there; the delicate tread necessary, the lovely and déchirant demanding exercise of becoming strange, which is at the same time coming ever closer to the bone.

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Wednesday, April 04, 2007

Situations créoles : l'invention de la nation, peuple, république

Imagined Communities. Benedict Anderson, 1983, revised and extended edition 1991, Verso.
La proposition importe, et elle dégage, elle fait de la place : le chapitre « Creole Pioneers » donne à revoir depuis la perspective des colonies l’ensemble de l’histoire des nationalismes et largement le passage de la société européenne féodale à l’état-nation en passant par l’état absolutiste centralisé - les Lumières et le libéralisme, 1760-1830, plus précisément 1776-1838, étant la période qu’il indique ; le capitalisme et en particulier le print-capitalism, soit celui d’une capitalisation vernaculaire et vulgarisatrice des idées (populaire ? à voir). Hypothèse : c’est dans les Amériques que la nation-ness monte, en réaction contre les pressions absolutistes, monopolistes, (impôts et taxes, monopoles commerciaux) des métropoles impériales. Par quoi se dire Américain, ou Péruvien – puisque seul le Nord a eu les moyens, en print-capitalism en particulier, et par proximité géographique, commerciale et communautaire, de s’approprier le statut de créole du continent – le Sud devant se contenter de fragments du continent, l’Argentine divisé du Pérou, etc.
Les situations créoles Américaines : « a historically unique political problem » (58). Républiques, et non populaires / populistes.
Critique des anciens régimes et des régimes impériaux, et inauguration des premières républiques.
La modernité – la sortie de la communauté religieuse et dynastique/féodale, et relativisation + territorialisation + temps vide de la modernité simultanée – par l’indépendance acquise des colonies. Par le processus d’étrangérisation inhérent au colonialisme.
La nation comme identité collective, mais aussi simplement la république.
La nation, encore une fois confirmée comme produit du capitalisme colonialiste. (Encore une fois Weber alors ?)
Comment ça s’imbrique avec l’histoire des révoltes indigènes ; comment ça en profite, des deux côtés selon opportunités. Avec, aussi, l’histoire du racisme : de la miscegenation du dynastisme ou de la communauté religieuse (des convertis également), aux identités. L’histoire des vernaculaires et des langues d’état centralisées.

Le livre part depuis un problème du marxisme : que l’internationalisme n’a pas pu régler la question des guerres nationalistes (Vietnam, Cambodge, Chine de la fin des années 1970).
Il travaille, aussi, avec des moyens du liberalism : imagined, imagination, communities. « In an anthropological spirit » (5) qui s’aligne avec des modes comme ceux de Tocqueville, de Herder, pour une culture du politique – le nationalisme vu moins comme une idéologie que comme une « vie des peuples » (Saussure) : « It would, I think, make things easier if one treated it as if it belonged with ‘kinship’ and ‘religion,’ rather than with ‘liberalism’ or ‘fascism’ » (5). Problèmes de « profound emotional legitimacy » (4), affective, imaginative response, « forms of imagining » (24), « emotional plausib[ility] » (51), attachment, « ourness » (this, these, we… un performatif du national, avec journaux et romans comme producteurs d’une communauté de lectorat). Critère : sacrifices personnels consentis (mourir pour).
Il oppose un « selfconscious » rationaliste qui pense le peuple sur un modèle des Lumières, et un « unselfconscious » national ? [note importante sur 1776 l’Indépendance américaine se réclame de « the people », tandis que la Constitution de 1789, « ‘nation’ makes its debut ». 65]

L'important, c'est donc cette ancestry des nations européennes ("models") : la nation par indépendance postcoloniale, mais aussi sans le peuple. Avec les indigènes éventuellement mais avec le racisme. De préférence, en toute méfiance des indigènes, des esclaves, des populations dominées de toutes sortes, sujettes à révoltes politiques. La nation, et la république, comme une sorte de résistance au politique.
Non, je n'arrive pas bien à mettre le doigt dessus. Ce n'est pas ça. En tout cas quelque chose qui doit détacher l'image des diverses révolutions et républiques américaines de leur association populiste, ou démocratique égalitaire.
D'abord l'état, puis la nation, (le peuple variant chaque fois, depuis le "bon peuple" des dynasts jusqu'à...), et la république, mais toujours pas la démocratie. Toujours la démocratie avec ses replis retraits, arrières. Les masses, la mob, etc. Il faut attendre le mouvement ouvrier ?

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Friday, March 30, 2007

Art et peuple : république / démocratie(s)

Art et démocratie, Peuples de l’art, PUF 2003, Joëlle Zask.
J’aime son ton, et la liberté de son ton et de sa méthode. La place de manœuvre qu’elle se donne, pour travailler, simplement. Et le « regard », en effet, qui se construit au fil des problèmes, y compris sur un ici-et-maintenant social politique et culturel.

Bon, méthode « analogique » – et sans doute là un problème, à suivre en tout cas. (Dont la métaphore, filée, de la naissance et de l’accouchement, « organique », même avec les précautions.) L’art comme analogue du politique, du démocratique en particulier ; et donc fonctionnant comme critique de modes politiques déterminés, historiques, et plusieurs : critique du républicain (à propos de l’enseignement et de l’enseignement de l’art), critique du pluralisme et du communautarisme, critique de la philosophie politique des Lumières, Rousseau et toute la théorie de la différence comme inégalité – d’autres critiques sont annoncées plus loin.

Une pragmatique du politique – comme de l’art. Bon. A dérouler. Etudier les situations de l'art pour nourrir une philosophie politique (le volume est publié dans la collection "Intervention philosophique", Yves Charles Zarka). L'art comme modèle. Ce n'est pas la même chose que la question du rapport de l'art au politique. Autre question ; pas forcément déniée.

Et : un irénisme ? L’art, comme la démocratie vivante, comme vitalisation de l’individu s’individuant, dans par le commun. Un irénisme communicationnel, ou ici interactionnel. Zask dit : du commun, du partagé, de la participation (– mais aussi : « Ce tableau est sans doute idyllique », 91. Ce n’est pas à prendre comme un problème de sa méthode : elle travaille comme ça, s’inspire d’une enquête, et construit ses schémas d’intelligibilité du politique, au ras d’une pensée et au fil des rencontres, objets et moyens du travail. Elle teste, propose. Et en effet il y a à tester ; en effet ça déplace, doucement, bouscule, des modes de pensée politique, traditionnels philosophiques as well as contemporains reconnaissables d’un état culturel. C’est ça qu’il y a à recueillir de sa lecture.)
Quelle place pour le conflit, et le critique ? Elle parle du minoritaire dans le multiculturalisme : ce récit même, au plus littéralement politique, est un peu joli peut-être. Les calculs se font, se déroulent, ensuite, dans la pratique sociale et ses entremêlements complexes, et agonistiques.

Refreshing. Une pensée pragmatique du politique (elle dit : de la politique), Dewey, Peirce. Qui parle de ressources, vie, forces, précieux, humanisation, – puis ça tourne court dès qu’on passe à partage, participatif, commun, communauté, rencontre, faire la place à l’autre, autrui.

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Saturday, March 24, 2007

La "literary pursuit" du national

A noter, comme configuration de l'épique : instance d'une poétique du peuple - ici poétique de la colonisation :
Stephen E. Ambrose préface l'édition des Journals of Lewis and Clarke [1803-1806] par Bernard DeVoto par ces termes : "These journals are a national literary treasure. Lewis and Clark's exploration of the western two thirds of the continent was our epic voyage, their account of it is our epic poem." (Plus loin : "You see the country through their eyes. It unfolds before you [...] with a vividness enhanced by the knowledge that you're seeing with the eyes of the first literate men to view these sights". A little close to the bone there, I'd say). 1996.
En 1953, DeVoto écrit : "The journals are an American classic". Mais surtout donne une histoire de la première exploration de colonisation vers le Far West, commandée par Jefferson, dans le contexte national d'une jeune république soucieuse de consolider une unité que les pionniers effilochent sur ses bords ouest, et dans le contexte international d'une situation entre l'enclume de l'Angleterre hyperpuissance politique et (post)coloniale et le marteau de la France hyperpuissance militaire de Napoléon, qui se voit rétrocéder la Louisiane (soit tout le Sud et tout l'Ouest non Espagnol/Mexicain du continent) par l'Espagne juste dans ces premières années de Birth of a Nation. Dans la lettre secrète adressée au Congrès le 18 janvier 1803, demandant les fonds pour l'expédition qui remontera la Missouri River jusqu'à frayer le fantasmé Passage du Nord-Ouest overland : "He suggested that it be made 'for the purpose of extending the external commerce of the United States,' phraseology which was so general that as the title of a bill it would attract no attention. He would, however, explain the expedition to Spain as 'a literary pursuit,' that is, as solely an effort to add to geographical and scientific knowledge".

Le littéraire ici est encore celui du savoir lettré. Mais il est déjà celui d'un performatif du national; de l'état-nation-science. Et de la grande machine mythologique américaine. Prenant une place particulière dans l'histoire des empires, explorations et colonisations du grand 19ème occidental.

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