Wednesday, April 04, 2007

Situations créoles : l'invention de la nation, peuple, république

Imagined Communities. Benedict Anderson, 1983, revised and extended edition 1991, Verso.
La proposition importe, et elle dégage, elle fait de la place : le chapitre « Creole Pioneers » donne à revoir depuis la perspective des colonies l’ensemble de l’histoire des nationalismes et largement le passage de la société européenne féodale à l’état-nation en passant par l’état absolutiste centralisé - les Lumières et le libéralisme, 1760-1830, plus précisément 1776-1838, étant la période qu’il indique ; le capitalisme et en particulier le print-capitalism, soit celui d’une capitalisation vernaculaire et vulgarisatrice des idées (populaire ? à voir). Hypothèse : c’est dans les Amériques que la nation-ness monte, en réaction contre les pressions absolutistes, monopolistes, (impôts et taxes, monopoles commerciaux) des métropoles impériales. Par quoi se dire Américain, ou Péruvien – puisque seul le Nord a eu les moyens, en print-capitalism en particulier, et par proximité géographique, commerciale et communautaire, de s’approprier le statut de créole du continent – le Sud devant se contenter de fragments du continent, l’Argentine divisé du Pérou, etc.
Les situations créoles Américaines : « a historically unique political problem » (58). Républiques, et non populaires / populistes.
Critique des anciens régimes et des régimes impériaux, et inauguration des premières républiques.
La modernité – la sortie de la communauté religieuse et dynastique/féodale, et relativisation + territorialisation + temps vide de la modernité simultanée – par l’indépendance acquise des colonies. Par le processus d’étrangérisation inhérent au colonialisme.
La nation comme identité collective, mais aussi simplement la république.
La nation, encore une fois confirmée comme produit du capitalisme colonialiste. (Encore une fois Weber alors ?)
Comment ça s’imbrique avec l’histoire des révoltes indigènes ; comment ça en profite, des deux côtés selon opportunités. Avec, aussi, l’histoire du racisme : de la miscegenation du dynastisme ou de la communauté religieuse (des convertis également), aux identités. L’histoire des vernaculaires et des langues d’état centralisées.

Le livre part depuis un problème du marxisme : que l’internationalisme n’a pas pu régler la question des guerres nationalistes (Vietnam, Cambodge, Chine de la fin des années 1970).
Il travaille, aussi, avec des moyens du liberalism : imagined, imagination, communities. « In an anthropological spirit » (5) qui s’aligne avec des modes comme ceux de Tocqueville, de Herder, pour une culture du politique – le nationalisme vu moins comme une idéologie que comme une « vie des peuples » (Saussure) : « It would, I think, make things easier if one treated it as if it belonged with ‘kinship’ and ‘religion,’ rather than with ‘liberalism’ or ‘fascism’ » (5). Problèmes de « profound emotional legitimacy » (4), affective, imaginative response, « forms of imagining » (24), « emotional plausib[ility] » (51), attachment, « ourness » (this, these, we… un performatif du national, avec journaux et romans comme producteurs d’une communauté de lectorat). Critère : sacrifices personnels consentis (mourir pour).
Il oppose un « selfconscious » rationaliste qui pense le peuple sur un modèle des Lumières, et un « unselfconscious » national ? [note importante sur 1776 l’Indépendance américaine se réclame de « the people », tandis que la Constitution de 1789, « ‘nation’ makes its debut ». 65]

L'important, c'est donc cette ancestry des nations européennes ("models") : la nation par indépendance postcoloniale, mais aussi sans le peuple. Avec les indigènes éventuellement mais avec le racisme. De préférence, en toute méfiance des indigènes, des esclaves, des populations dominées de toutes sortes, sujettes à révoltes politiques. La nation, et la république, comme une sorte de résistance au politique.
Non, je n'arrive pas bien à mettre le doigt dessus. Ce n'est pas ça. En tout cas quelque chose qui doit détacher l'image des diverses révolutions et républiques américaines de leur association populiste, ou démocratique égalitaire.
D'abord l'état, puis la nation, (le peuple variant chaque fois, depuis le "bon peuple" des dynasts jusqu'à...), et la république, mais toujours pas la démocratie. Toujours la démocratie avec ses replis retraits, arrières. Les masses, la mob, etc. Il faut attendre le mouvement ouvrier ?

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