Wednesday, October 11, 2006

Culture wars (2)

"Culture wars" permet de comprendre une part de l'actualité critique et politique aux Etats-Unis; et en particulier l'état du rapport entre l'université et la "société", ou le débat public - sous la rubrique de "campus culture wars". Ce qui veut dire les médias et les votes. La puissance culturelle, polémique, des néoconservateurs. Et le rôle critique de la littérature, et de English, là (la littérature comme déproblématisation, la littérature pour la polémique - la polarisation du débat en un scénario de la guerre, qui est le même procédé, rhétorique du politique, qui débouche sur la situation en Irak -, les défenses - mauvaises défenses - de la littérature et des savoirs associés à la littérature, la littérature pour la problématisation dans processus culturel). Question du backlash anti-théorie aussi. Ici avec des coordonnées particulières, à distinguer.

Wikipédia me donne un premier repérage et une première généalogie: Culture war. Qui fait intervenir Gramsci et donc le rapport américain au marxisme, cette épaisse tradition, identitaire ; James Harrison Hunter et Bill O'Reilly (maintenant voix établie, auteur du tout récent Cultural Warrior, et animateur clé sur la chaîne de télévision de Rupert Murdoch, Fox - dans l'émission "The O'Reilly Factor" - rien que ça) ; le "paléoconservateur" Pat Buchanan et sa campagne de soutien à l'élection présidentielle de Bush père en 1992.
Les néoconservateurs sont, je le comprends mieux, la version américaine de la pensée anti-68: réaction contre le "libéralisme" (au sens américain) des années 60. Une réaction qui se traite sur le plan des "valeurs", et donc de la culture, "common culture" (équivaut au français "culture générale" dans ce débat), et ce que Graff appelle "the myth of the vanishing classic" : les discours sur la "balkanisation" (mot de Harold Bloom) des études de English et la dissolution du canon dans les marées des "minority political agendas", devenus en cours de route désignables sous l'étiquette polémique de "political correctness".
Une des coordonnées reste donc la Guerre Froide. Et comment vivre le politique dans son après. Voir aussi comment la question de la grande guerre culturelle du libéralisme américain avec le marxisme implique la question de la décolonisation : la Guerre Froide et le Tiers-Monde dans sa valence de non-alignement. Marx et les analyses de l'impérialisme: on remonte jusque là. Et la question du multiculturalisme donc ; avec la pression de l'immigration (latino en particulier). Quand le vote récent a-t-il eu lieu ici sur l'anglais comme la langue officielle unique; sur quel mode et à quel degré ?

M'intéresse là : la situation de Graff ; celle de ses interventions. Compter dans l'équation, par exemple, le fait que son Literature Against Itself. Literary Ideas in Modern Society (1979) avait été lu comme une attaque anti-théorie. En 1979! Et qu'il donne comme linchpin à son Beyond the Culture Wars la question du rapport de l'université au débat public. C'est fait dans des termes assez grossiers : données comme des évidences, les notions corporatistes ordinaires : la tour d'ivoire, l'insularité, les private jokes, etc.
Assez grossière aussi l'analyse (au fil du texte et implicite seulement) du processus par lequel la modernité politique (the "demographics" of student population, the democratization of universities, multiculturalism, etc.) se reflète ("is mirrored") dans les changements des programmes d'étude - curieusement, on ne parle de révolution que concernant le choix des oeuvres mises au programme. Quid des approches et redéfinitions conceptuelles ? - et dans la mise au jour des conflits.
N'empêche : le phénomène est significatif. Il détermine un contexte, intellectuel critique politique.

Il y a une spécificité des conditions et de l'histoire intellectuelle / histoire des intellectuels ici, déterminée en particulier par l'histoire de l'université. François Cusset en parle dans French Theory, il faut que j'y retourne: il fait intervenir les traditions religieuses et les églises comme déterminants culturels, pour commencer. Une autre histoire des "clercs" donc. Il faut regarder aussi dans l'histoire de "Professing Literature" (Graff).

0 Comments:

Post a Comment

<< Home